Le monde imaginaire de Franck Barret

 Franck Barret                                                         

                                                  Fragment : petit monstre, hauteur 6 cm                                                                                                                                                                                                                                Fragment : hauteur 3 cm

A la limite de Pineuilh et de Saint-Philippe-du-Seignal.

 Franck Barret est né en 1909  dans la commune de Saint-Antoine-de-Breuilh, dans une famille de riches agriculteurs.

 Issu d’une riche famille de Saint Antoine de Breuilh, Franck Barret se passionne pour le vélo, à l’adolescence il devient coureur cycliste amateur, un bon coureur régional, pressenti pour le tour de France.

 Il fait partie  des coureurs foyens qui s’illustrent dans les compétitions locales et régionales.

 Il côtoie Jean Roturier, Robert Chouet, Robert Larignière, Marius Duteil, etc.

 En 1934, lors d’une course à  Saint-Emilion, il chute gravement, son guidon lui traverse le genou. Après 2 ans d’hôpital, grâce à sa volonté, à la surprise des médecins, il retrouve tant bien que mal l’usage partiel de son genou. Il adapte la pédale de sa bicyclette et reprend en amateur le vélo. Il ne fera plus jamais de  compétition.

Il devient l’entraîneur de Georges Dupré autre gloire régionale après la deuxième guerre mondiale

 Mais il faut travailler, ses parents lui confient une ferme au lieu dit «Goubières» à la limite de Pineuilh et Saint Philippe du Seignal. Franck y passera sa vie. il se marie et un garçon naît.

 Comme beaucoup il aidera la résistance pendant le deuxième guerre mondiale.

 

L’aviateur Guynemer, le fantôme de l’opéra, l’actrice,                     L’ange Gabriel, Marie, Jésus dan son berceau, Joseph                                                             Vercingétorix prisonnier
derriere Sainte Blandine sur le bûcher                                              Ces trois réalisations grandeur nature.

C’est après la guerre  que Franck Barret se met à  créer à avec l’argile qu’il va chercher avec sa brouette dans une grotte « les caches » à quelques centaines de mètres du château de Bourgognade

Franck Barret était un artiste, ou plutôt il était LUI.

 Il devient une curiosité puis une célébrité. Le personnage est truculent, bon vivant et intelligent. Il sait passionner son auditoire, un conteur né.

 J’ai le souvenir de la dernière visite que j’ai faite de son musée vers 1973, j’avais dix huit ans, Franck Barret nous avait raconté ses visions, sa capacité à soigner, son don de médium, de rebouteux de l’âme humaine.. L’homme était passionnant, fin, intelligent, imaginatif. Il avait compris depuis longtemps qu’il pouvait exister, être quelqu’un. 

                                   

               Jeanne d’Arc,                                                                          le martien,                                                                         Françis Barret à l’âge de 10 ans

Son petit musée devient une curiosité, les journaux régionaux s’intéressent à lui, la télévision (Pierre Bonte), la radio lui rendent visite. Le Syndicat  d’in itiative  de Sainte Foy fait sa publicité, quelques sociétés savantes le contactent. Les nombreux visiteurs sont sa gloire.

 Entre 1955 et 1960 il commence à faire visiter son Musée.

 Celui-ci occupe les deux pièces du logement initial de la propriété (ferme datée de 1790, avec des ouvertures—portes et fenêtres– toutes petites). C’est  un foisonnement de réalisations plus surprenantes les unes que les autres.

 Quelques silex taillés, des reproductions en argile d’animaux de la préhistoire, un singe, la statue de Pie XII, le monstre du Loch Ness, la Sainte Trinité, etc.

  Agé et  malade Franck Barret décède en 1988.

Le musée est fermé. L’œuvre sans son créateur n’intéresse plus personne à part ses proches.. Vingt ans passent. La poussière recouvre les objets, une fuite dans le toit provoque quelques dégâts. Les pièces restent closes, sans ventilation ni aération… L’humidité …. L’argile se dégrade lentement, s’effrite, quelques souris, rats, chats s’installent. Le temps fait son œuvre sous les toiles d’araignée et le lierre qui s’agrippe aux  réalisations.

 Contacté par la famille Barret qui désire vendre la demeure familiale, le Musée du Pays Foyen entreprend le sauvetage de la collection.

  Les grandes pièces (plusieurs dizaines de kilos) ne supportent pas le transport malgré les précautions prises et les conseils du Musée d’Aquitaine. Nous avons sauvé ce qui pouvait l’être. Certaines pièces avaient déjà disparu…

 On trouvera quelques renseignements sur la vie sportive de Franck Barret dans l’ouvrage de Denis et Jacques Reix : « champions cyclistes du pays foyen », édité à compte d’auteur en 2004 (consultable à la bibliothèque municipale de Sainte Foy) et malheureusement épuisé.

 Son œuvre est évoquée dans la revue Le Festin n° 15 d’octobre 1994, par Jean Vircoulon et Christophe Garcia (consultable à la bibliothèque municipale de Sainte Foy).

 Les éditions Taschen, dans le livre « mondes imaginaires », édité en 2007, d’ Angelika Taschen, Deldi von  Schaewen et John Malzeis consacrent  4 pages à Franck Barret.

       Une certaine célébrité 

Pierre Bonte, animateur de « Vive la vie » sur Europe 1 et de « Chez nous en France » sur la 2ème chaîne de télévision (du temps de l’ORTF) était venu réaliser un reportage en 1976.

« …j’ai travaillé vingt ans endormi dans mon musée, c’est-à-dire que je rêvais, je me levais la nuit et je refaisais mes rêves. J’étais soi-disant dans un état second, c’était un esprit qui s’emparait de moi et qui me faisait travailler……….Et un beau jour, en 1968, ce fameux esprit s’est dégagé de moi et je suis redevenu le cultivateur… »

 Sud Ouest, le 9 décembre 1971 : « …je ne suis pas fou, je suis médium… » Francoise Favretto, la journaliste, écrivait :  « Qui est cet homme? un artiste? un névrosé se libérant de ses fantasmes par la création? un illuminé? un visionnaire? Un guérisseur? La foi s’allie en lui à l’émotivité et la naïveté. Il attend toujours quelqu’un qui puisse le définir… »

 Les cahiers de l’étrange n°5 (sans date retrouvée) J.P. Blanchard écrit : « …Comment comprendre cet homme qui lit peu, sort peu… à qui l’idée de vendre une œuvre n’est jamais venue à l’esprit? Pour lui tout semble si simple, il a reçu des ordres et ne les a pas discutés. aussi regarde t’il son univers d’argile avec, au cœur, la satisfaction du devoir accompli… ».

Dans le même article, à propos de ses dons de médium, Franck Barret précisait :

« quelle est votre méthode? »

« je m’adresse directement au Maître et, quand il veut bien m’exaucer, le malade est soulagé… ».

 L’imformation artistique, n° 55, 7 ème année, 1957 ou 1958, Un article de Géo Sandry.

 Guide de la France insolite. Claude Arz. Guide Hachette. 1990.

             la technique       

        Le gorille                                                                                                                Le yéti ou abominable homme des neiges

Son œuvre est originale et surprenante. On trouve dans le musée les documents qui lui ont servi de modèles (cartes postales de Lourdes, articles de journaux sur les ovnis, etc).

 Franck Barret n’avait pas appris à modeler, il a donc improvisé; Ses réalisations sont faites de couches successives, montées sur des carcasses d’osier et de ficelle de batteuse pour les plus grosses pièces. Les œuvres ont été bâties sur place pour les plus volumineuses, fixées au sol par des barres de métal. L’argile n’a pas été cuite. Les pièces sont peintes et recouvertes de poils d’artichaut, barbe de maïs pour les chevelures et pelages divers.

Il imagine, rêve, crée à partir d’illustrations ramassées de part et d’autre. Son éducation catholique se retrouve plusieurs fois dans les thèmes choisis. Ses amis lui suggèrent de présenter ses créations. Il transforme une petite maison de 2 pièces en musée. En 15 ans toute la surface est occupée.  Franc Barret se fait un plaisir de commenter les visites.

 En même temps il se découvre des dons de «médium»  et les utilise gratuitement au service de ceux qui font appel à lui.

 Devant son œuvre nous sommes frappés par la vie qui s’en dégage, par la finesse des détails, que la pièce fasse quelques centimètres ou 3 mètres de long.

l’œuvre de Franck Barret est éphémère, sa technique démontre une méconnaissance totale des techniques habituelles mais aussi une inventivité diabolique pour résoudre les problèmes.

 Franck Barret ne modélise pas, il ne sait pas. Comment partir d’une boule d’argile pour créer une personnage, surtout si le personnage fait 2 mètres de Haut?

 une armature métallique est plantée dans le sol, un squelette en osier, noisetier et ficelle est bâti.

 Une première couche d’argile établit le corps nu.

 Les vêtements et les accessoires sont construits ensuite.

 L’oeuvre sèche lentement puis elle est peinte.

 L’argile séchée, non cuite, est  très friable, sensible aux variations de température et d’humidité.

     

                              Le chevalier et le manant                                                         le déluge                                                                                              le chimpanzé

Franck Barret est décédé en 1988 après une longue maladie.

 Le musée ne sera plus entretenu. En novembre 2007, Monsieur Francis Barret  contacte le Musée du Pays Foyen : « nous vendons la maison, vous avez 4 mois pour sauver les sculptures de mon père. ».

 Certaines créations avaient disparu.

 Comment faire avec des pièces qui font plusieurs centaines de kilos,  qui ne passent pas par les petites fenêtres et les portes étroites?

 Contacté, le musée d’Aquitaine propose une solution : faire un moule autour de chaque pièce et couler de la résine transparente. Impossible de trouver une entreprise apte à le faire dans le temps imparti ,mais aussi un budget insensé de plusieurs centaines de milliers d’euro.

 Les photos  montrent l’état catastrophique des sculptures. Nous avons sauvé comme nous avons pu, malheureusement beaucoup de pièces s’effritaient, tombaient en morceaux malgré nos précautions.

Oiseaux, rongeurs, lierre grimpant ont envahi le petit musée, gratté, rongé les sculptures. Les variations de températures ont déformé l’argile, décollant des morceaux. Certaines scènes étaient bâti sur un socle de pierres agglomérées à la terre, elles n’avaient pas résisté lors de notre première visite. En particulier la représentation sur plusieurs mètres carrés de la basilique de Lourdes et de son funiculaire vers la montagne.

Les créations ont été nettoyées, dépoussiérées, recollées, les couleurs sont celles de Franck Barret.

 Nos remerciements à Claude Stroh pour ses archives et à me et mr Francis Barret pour leur gentillesse.

                                                        les créations de Franck Barret (avec sa terminologie)       

 

 1952 : Jésus entouré d’anges

1953 : le pithécanthrope de Java

1954 : Jeanne d’Arc

1954 : La Vierge Marie, Joseph et Jésus dans son berceau                        

1955 : Jésus enfant à l’^àge de 6 ans

1955 : l’ange Gabriel

1955 : le martien

1956 : Saint Joseph

1958 : Bernadette Soubirous

1958 : l’abominable homme des neige ou Yéti

1959 : le monstre du Loch Ness

1961 : le pape Pie XII 

– l’homme de Neandertal

– chasse tragique au gorille ‘avec le gorille, l’explorateur et     son épouse blessée.

– le fantôme de l’opéra et l’actrice Christine Delahaye

– l’aviateur Georges Guynemer

-l ’aigle fauve avec un chamois dans ses serres

– Sainte Blandine attachée au bûcher

– Vercingétorix prisonnier

– la cathédrale de Lourdes, avec la ville autour et le téléphérique du pic de Jers ( «1 000  et 1 nuits de travail » )

– le déluge

– les croisés devant Jérusalem

– le château de Pineuilh

– l’homme de Cro-Magnon

– Roland à Roncevaux

– le seigneur à la chasse à l’oursdevant son château

– Vercingétorix se rend à César devant Alésia

– le renard des neiges ou désigné parfois comme fennec

– l’église de Sainte Foy et quelques maisons de la rue de la république

– le pôle nord et ses animaux sur la banquise

– les singes

 les pièces disparues :

 (liste reconstituée à partir des  archives)

 – l e vautour noir

– le vampire de l’île de la Trinité (chauve souris)

– l’orang-outan, le hérisson, le loir, la taupe

– le gypaète

-Jésus dans son berceau

-reproductions d’animaux fossiles

-l’écureuil, la salamandre, des oiseaux mouche,

-la Hyène, Tortue, chat sauvage, ornithorynque,

-Francis Barret à l’âge de 10 ans

-le chimpanzé, l’oiseau lyre, le perroquet

-reproductions d’avions

l’aigle pêcheur, le jaguar

-la crêche

-Bernadette Soubirous, la sirène, Charles VI devenant fou en l’an 1392.

  Franck Barret, guérisseur…

  Nous avons retrouvé environ 2OO lettres de « patients » qui demandaient de l’aide. Ces lettres couvrent une vingtaine d’années entre 1967 et 1981. Nous ne porterons aucun jugement. La détresse humaine, plus ou moins importante, plus ou moins réelle, est bien là. les auteurs sont essentiellement des femmes qui écrivent aussi bien pour elles que pour leurs proches.

« Monsieur Barret, pensez bien à mon petit soucis… »

Peines de cœur, maladies, réussite scolaire, trouver ou conserver un emploi, problème d’argent,

«… ce que vous faites pour venir en aide aux gens qui souffrent… » B.M. le 10/10/1980

Aider un proche qui « fréquente une mauvaise personne », passage du permis de conduire  (« pensez à moi mercredi de 3 H à 4 H »)

La poisse, la malchance,   problèmes familiaux, d’héritage, les tracasseries de l’administration, un deuil (« donnez moi du courage »).

La réussite commerciale, combattre un mauvais sort « elle a jeté son mauvais œil sur moi, je vous envois sa photo pour que vous puissiez la combattre… »

La restauration
 
 
Ce fut un travail long et frustrant.
De nombreuses sculptures étaient fendues, ne supportant plus l’abandon, les attaques des plantes et des petits animaux, les variations de températures.
Avant le déménagement chaque pièce a été emballée dans un corset de film bulle, de papier froissé et enfermée dans une cage de grillage.
Le sol a été creusé et les fixations métalliques tronçonnées.
Déjà, le simple fait de coucher les pièces et, de part leur propre poids, elles s’abîmaient.
Certaines pièces, construites sur place, ne passaient ni par les portes, ni par les fenêtres. Imaginez le yéti, 1m 95 de haut, plus de 200 kilos, le monstre du Loch Ness avec ses 5 m de long, etc.
Nous avons passé deux ans à restaurer, dépoussiérer, coller les différents morceaux, les pièces ont gardées leurs couleurs originelles.
Merci à Catherine, Carmen, Colette, Patrick, François, Serge, Pierre et ceux qui nous ont soutenus par une petite visite impromptue.
.
Ci dessous le lien pour retrouver sur le site de l’INA l’émission de Pierre Bonte avec Franck Barret.
.
.
Le musée a édité une plaquette, plus complète,  en couleur, de 26 pages, en vente à l’Office de tourisme de Sainte Foy à partir de janvier 2011. ou bien adresser un chèque de 15 € (frais de port compris) libellé au nom de musée du pays foyen, à l’adresse suivante :          
                                 Musée du Pays Foyen
                                 102 rue de la république
                                 33220 Sainte Foy La Grande
L’exposition est visitable, uniquement sur rendez vous au 142 rue de la république
le mercredi soir à partir de 20h 30,  le samedi après midi de 14h à 18h et le dimanche.
téléphoner au 05 57 46 59 73            06 75 70 35 34
                           06 28 37 73 63